L'indication ne trompe guère. Elle figure en couverture de ce livre. Dans l'emploi du pluriel, qui suggère d'entrée de jeu la diversité des «pays des Serbes» et écorne, si c'était encore nécessaire, l'unicité et le mythe de la Grande Serbie chère aux nationalistes. Toute la justesse de cet ouvrage, qui tient lieu du carnet de voyage, du reportage au long cours (été 2001-hiver 2002) et du document, réside dans cette discrète allusion et le ton adopté pour traiter de «ce qui traverse les gens», ces états d'âmes d'une communauté serbe montrée du doigt depuis le début des guerres yougoslaves en 1991.
C'est terrible et salutaire, surtout de la part d'un journaliste indépendant qui a lui-même des origines serbes qu'il questionne sans fin. Pour mieux se défaire du tragique et de la grandiloquence de la «geste héroïque serbe». Jamais à charge, jamais complètement en phase avec ces interlocuteurs, Christophe Dabitch accompagné du dessinateur David Prudhomme signe des textes narratifs et personnels où les conversations rapportées donnent toute la mesure et l'étendue du malaise et de la violence vécus dans cette communauté paumée et oublieuse. Pendant un an et demi, les deux compagnons de voyage ont entrepris une «descente aléatoire du nord au sud», de la Voïvodine (province du nord de la Serbie) en passant par le Kosovo où Dabitch se limite à quelques constats hâtifs et maladroits sur l'action de l'Otan en 1999 et la Bosnie que les auteurs semblent, étonnamment, tenir à dista