Soit. Les auteurs de Matrix, machine philosophique n'ont pas vu le film en avant-première. Nous ne pouvons que nous en réjouir, et féliciter la Warner qui eut la sagacité de ne pas les inviter. Leur réponse rétablit certains faits, et oppose leur stratégie à celle que nous leur avions prêtée : loin de se faire complices de la machine médiatique et économique en publiant leur livre le jour de la sortie de Matrix Revolutions, ils l'auraient au contraire détournée à leurs propres fins, utilisant la publicité autour du film pour faire passer un peu de philosophie en contrebande. Sont-ils bons, sont-ils méchants, compromis ou résistants ? Chacun pourra désormais se faire son idée. Peu importe, l'essentiel est ailleurs. Une fois de plus, on aura constaté combien ces séparations binaires s'appliquent mal à la logique de la société du spectacle. Car l'entreprise qui consiste à lancer un livre selon des procédés publicitaires éprouvés, et simultanément à espérer qu'il soit reçu comme n'en relevant pas, est au moins périlleuse : lorsque la subversion épouse à ce point la logique dominante, il devient difficile d'identifier le personnage sympathique du philosophe contrebandier sous les traits du serviteur de l'industrie culturelle...
On aura l'impression que cette situation nous plonge en plein Matrix, en plein dans l'indécidabilité de l'apparence et de la réalité, du «virtuel» et de l'actuel, l'un et l'autre se surdéterminant à l'infini. Peut-être. Et pourtant, malgré tout, d'autres st