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Libération
Critique

Génération beurs, la mémoire en berne.

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Livre. Boubeker, militant et universitaire, explique comment l’espérance des années 80 s’est muée en malentendu.
publié le 8 décembre 2003 à 2h14

Vingt ans déjà depuis l’arrivée triomphale dans les rues de Paris, le 3 décembre 1983, de la Marche des beurs. Et depuis, toute une génération s’est engouffrée dans cette nouvelle histoire de la société française. Bien des visages, bien des personnalités se sont investis dans l’espace public, tentant de porter des discours et des pratiques de changement. Aujourd’hui, on dirait que cette génération s’est repliée, ou, plutôt, qu’elle a déserté des lieux publics.

Ahmed Boubeker est de ceux-là. Né dans une cité à Saint-Chamond (Loire), il a travaillé, étudié, partagé, analysé. Mêlant peu à peu un travail de terrain, souvent proche du militantisme, à un travail universitaire de haut niveau. Au début des années 80, il a sillonné les milieux beurs, partageant les espoirs de la première marche des beurs puis l'impasse, l'année suivante, des Mobylette de Convergence qui se sont terminé place de la République, à Paris. Les jeunes issus de l'immigration dressant alors le constat d'une société française qui ne leur laissait pas vraiment de place. Puis il y eut le bulldozer de SOS Racisme qui écrasa tout ce jeune mouvement. Jusqu'aux tentations du repli communautaire, et enfin l'éclatement en histoires individuelles, lourdes et secrètes.

Ahmed Boubeker a résisté. Il a continué son parcours, forgeant au passage ­ dans des articles universitaires ­ la figure du lascar, puis celle de la beurgeoisie, du cousin, d'autres encore. Promenant sa grande silhouette amusée, et toujours aux aguets. Auj