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Libération
TRIBUNE

L'individu autonome contre le multiculturalisme

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publié le 26 décembre 2003 à 2h28

Dans l'affrontement actuel sur la question du voile, nombreux sont ceux qui s'inquiètent, à juste titre, des dangers de fragmentation sociopolitique que ferait courir à notre société la logique communautariste. Cette dernière revient à faire de l'appartenance collective une dimension indépassable du sujet, instaurant le primat de la tradition sur l'argumentation et rendant ainsi impensable l'émancipation par la raison. Or, même si le communautarisme constitue l'idéal politico-moral de tous les fondamentalismes religieux, et donc de l'islamisme, il ne constitue pas un risque immédiat. Il me semble, par conséquent, que le débat intellectuel gagnerait à se recentrer sur le défi que pose à notre modèle politique le multiculturalisme normatif et sa volonté de donner à la différence culturelle une dignité que la modernité est supposée lui refuser.

Contrairement aux idées reçues, la politique multiculturaliste a été expérimentée au Canada, en Australie et en Suède avant de l'être aux Etats-Unis. C'est pourtant l'expérience américaine qui sert le plus souvent de référence. L'institutionnalisation du multiculturalisme obéit là-bas à deux logiques distinctes, l'une de nature socio-économique, l'autre de nature identitaire. La politique d'affirmative action, que l'on situe trop souvent sur le seul terrain de la reconnaissance culturelle, obéit en réalité à des préoccupations d'égalité sociale. La discrimination positive vise, en effet, à restaurer l'égalité et participe, dès lors, du mê