Menu
Libération
TRIBUNE

Prévenir, c'est guérir un peu

Article réservé aux abonnés
publié le 1er avril 2004 à 0h03

La Passion du Christ de Mel Gibson, comme plus modestement l'affaire Dieudonné en France, repose l'éternelle question de la stratégie de l'antiracisme. Partons, hélas, du principe que le racisme est l'un des sentiments les mieux partagés entre les humains. Depuis des millénaires, nos ancêtres ont tissé un réseau d'interdits pour nous protéger contre nous-mêmes : «Tu ne tueras point», «Tu respecteras», «Tu ne blanchiras pas le visage d'autrui en public», «Tu aimeras ton prochain comme toi-même»... sans parler de la Déclaration universelle des droits de l'homme et des lois condamnant tout appel à la haine raciale ou religieuse que les démocraties ont introduites dans leur jurisprudence depuis la guerre.

Malgré ces barrières, malgré le travail immense accompli par l'Eglise de Jean XXIII à Jean Paul II, avec la révision des textes qui pouvaient encourager des sentiments antijuifs parmi les chrétiens, tout antiraciste sait que «rien n'est jamais acquis à l'homme». Il suffit de laisser passer sans réagir une image, un mot, un texte, une émission, un film dégradant pour certains de nos semblables, et tout le travail accompli à travers les siècles serait remis en question.

Aussi, quand mon ami Abe Foxman, directeur de l'Anti Defamation League (ADL), l'organisation antiraciste la plus connue aux Etats-Unis, m'a appris l'existence du film de Mel Gibson et la manière dont on y présentait les Juifs, j'ai pensé qu'il fallait d'urgence rencontrer son auteur. Je crois au pouvoir du verbe et