En 1991, on disait : la seconde superpuissance, l'URSS, a disparu. Il n'en reste qu'une, les Etats-Unis. Une seule superpuissance, qu'est-ce que ça donne ? Le retour d'un impérialisme agressif ? Cela peut paraître logique. A y regarder de plus près, pourtant, cette hypothèse ne fonctionne pas bien. D'une part, parce qu'il n'y a plus de projet crédible ou même simplement réaliste pour une domination coloniale, même modernisée. D'autre part, parce que la dynamique mondiale, intense dans le domaine «civil» (économie, rapports sociaux, culture), appelle le politique comme jamais. Il faut des politiques publiques de développement, de la police, de la justice et surtout des procédures de délibération suffisamment lisibles pour que, si possible, ni certaines sociétés, ni certains groupes, ni certains individus ne se sentent exclus de la mondialisation. C'est pourquoi le pays le plus puissant ne peut pas constituer un empire. Par ailleurs, il subit une pression croissante, de lui-même, parce qu'il est aussi le plus engagé dans l'interdépendance mondiale et, de la part d'autres acteurs, pour faire de la politique.
L'équation du monde actuel, c'est que le politique est nécessaire mais qu'une partie de son exercice, notamment tout ce qui relève de l'usage légitime de la violence, repose sur un morceau du monde, les Etats-Unis. D'où un problème d'autant plus préoccupant qu'on n'en voit pas clairement l'issue : la part de leadership que les Etats-Unis exercent sur le monde se définit et s