Aquel moment de la pré- ou de la campagne référendaire sur la Constitution européenne dira-t-on que le «oui», qui marchait vent en poupe depuis l'hiver, vit se briser sa marche triomphale ? Vendredi, à Barcelone, l'estrade que battaient seuls le socialiste Zapatero et son hôte «de centre droit» Chirac (voir Libération des 12 et 13 février) semblait moins vide des absences de Berlusconi et de Schröder, diplomatiquement grippés, que pleine de soudaines incertitudes. Il semblait que, franchissant les Pyrénées pour prendre d'assaut la tribune espagnole, s'y étaient fermement installées les grandes ombres tutélaires qui ressuscitent ici l'hypothèse formidable d'une victoire du «non» : par ordre d'entrée en scène, l'agrégation hétérogène de l'opposition à l'entrée de la Turquie dans l'Union ; la brutale révélation de l'essence a-sociale de la directive Bolkestein ; le rejet du traité par le comité confédéral national de la CGT ; et les fraîches et joyeuses galopades de cent mille lycéens, susceptibles de réveiller d'un seul coup d'un seul un mouvement social successivement écrasé par les réformes des retraites et de la santé, et les atteintes au droit de grève et aux trente-cinq heures. Comme si, ayant par trois fois, l'an passé, bafoué le jugement des urnes (régionales, municipales et européennes) en n'en tirant pas les conséquences (en conservant à Matignon Raffarin), Chirac et sa clique se voyaient désormais contraints de disputer en juin prochain un autre round, dans un scruti
La frustration des urnes
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par Pierre Marcelle
publié le 14 février 2005 à 0h32
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