L'hésitation des Français face à la Constitution est parfaitement légitime. Légitime avant tout la méfiance de la «France d'en bas». On leur a tellement menti depuis l'Acte unique et Maastricht, censés créer des dizaines de millions d'emplois, depuis Amsterdam et Nice, censés doter l'Europe de la superstructure politique qui manquait à Maastricht... L'Europe que connaissent les ouvriers, les employés, les petits paysans, c'est l'Europe de l'austérité, du chômage, de la destruction des services publics au nom de la libre concurrence.
Comment faire comprendre aux victimes de l'Europe de Maastricht et de Nice que la Constitution leur offre des armes contre cette Europe qu'ils détestent ? Comment leur faire admettre qu'on ne vote pas contre l'Europe de Maastricht et de Nice par un non qui maintient ces traités ? Comment les convaincre, face au bombardement du sottisier du camp du non («la Constitution, c'est le rétablissement de la peine de mort, l'interdiction de l'avortement, la fin de la laïcité, la directive Bolkestein...») ? Comment leur faire réaliser qu'on ne négociera pas un meilleur traité, quand presque toute la gauche européenne hors de France est pour le oui, quand presque tout le camp du non, en Europe, est ultralibéral et souverainiste ?
Tout aussi compréhensible, quoique beaucoup moins légitime, est l'opposition d'une partie de la France d'en haut, le non des «bacs + 4 et plus», des ténors de la social-démocratie tels Laurent Fabius, de ses économistes tels Jean-Pau