«J'estime que Mark Felt est un des plus grands héros américains de l'ombre ; ce sont des événements historiques qui l'ont obligé à se comporter comme il l'a fait.» Pas de doute : pour l'avocat de la famille Felt, John O'Connor, l'ancien numéro 2 du FBI du sulfureux Edgar Hoover, a agi par moralisme et par patriotisme en fournissant secrètement aux deux journalistes du Washington Post, Bob Woodward et Carl Bernstein, les informations sur le scandale du Watergate qui allaient contraindre en août 1974 Richard Nixon à démissionner du poste de président des Etats-Unis. Mark Felt, convaincu qu'aucun homme n'est au-dessus de la loi, n'aurait pas supporté que son Président ait eu recours au cambriolage du quartier général démocrate avant l'élection présidentielle de 1972 puis au mensonge éhonté, pour camoufler ses responsabilités. La fable, exposée par John O'Connor et reprise en choeur par la famille de Mark Felt, est émouvante. Mais elle est mensongère. Elle a déjà été sérieusement écornée par les deux reporters du Washington Post, qui viennent de reconnaître que leur informateur était en partie mû par la rancune : Nixon, qui connaissait tout des méthodes très particulières du clan Hoover, avait préféré à la mort de ce dernier confier la direction de la police fédérale à Patrick Gray, un fidèle, étranger au sérail du FBI, plutôt qu'au dauphin institutionnel qu'était Mark Felt.
La plupart des commentateurs de la fin du plus grand et plus long secret de Washington ont cependant omis