Monsieur Giscard d'Estaing a raconté la scène où en 2003, il a remis à M. Berlusconi, alors Président en exercice du Conseil européen, le projet de «Constitution» issu des travaux de la «convention», relié en cuir bleu. Une mouche passait : son entêtant bourdonnement nuisait à la solennité de la scène. M. Berlusconi, s'étant saisi de l'exemplaire relié en cuir bleu, d'un geste prompt, écrasa la mouche et laissa tomber : «Au moins cette Constitution aura-t-elle servi à quelque chose !» Cette scène prend aujourd'hui toute sa saveur : Cette Constitution mort-née était-elle bien nécessaire ? Le président Chirac avait-il besoin, après Joschka Fisher, d'en agiter l'idée devant le Bundestag en juin 2000 ? Je lui ai posé la question à son retour en France : «Pourquoi avoir proposé à vingt-cinq peuples une Constitution, alors que seul un Peuple peut se donner une Constitution et, qu'entre eux, vingt-cinq peuples passent un traité ?» Le président Chirac dont l'idée d'un «Peuple européen» ne hante sans doute pas les nuits, à la différence de nos «fédéralistes», me rétorqua : «C'est pour répondre à la question : "Qui fait quoi en Europe ?" C'est une sorte de règlement intérieur.» S'il ne s'agissait que de cela, point n'était alors besoin d'une «Constitution» !
M. Giscard d'Estaing a reconnu lui-même que la convention qu'il présidait s'était «faufilée» à travers «un membre de phrase glissé à la fin du texte [de Laeken... qui] entrebâillait une porte en posant la question de savoir si cett