Au lendemain de ce qui apparaît comme un tournant dans la société française, la gauche tout à ses règlements de comptes entre «sociaux-libéraux» et «antilibéraux» semble dans l'incapacité de mesurer l'ampleur du désastre auquel elle a pourtant participé depuis vingt-cinq ans. En panne de projet au moment où elle devrait être en première ligne, elle sème dans son propre camp les germes d'une division qui peut être durable. Les «oui» comme les «non» de gauche ne peuvent se contenter de ressasser leurs certitudes et se figer sur des positions de principe. On ne rassemble pas sur la méfiance et les rancoeurs.
J'ai défendu ce projet de Constitution, par conviction européenne et parce que je croyais sincèrement que nous tenions là une occasion unique que nous ne reverrons pas de sitôt de franchir un pas décisif dans la construction de l'Europe fédérale que les Verts ont toujours souhaitée. Pourtant, la dynamique électorale a été portée par les partisans du non de gauche. A partir d'un discours «antilibéral» classique associé à une demande de changement de méthode dans la construction européenne, ils ont rencontré une majorité du pays qui éprouve un douloureux sentiment de vulnérabilité sociale et économique et qui en veut beaucoup aux «élites» devenues les boucs émissaires de ce désenchantement général. Ce vote a été populaire et nourri d'une démarche «citoyenne» évidente. Le reconnaître n'est pas aller à Canossa, mais se demander simplement pourquoi, avant le 29 mai, la questi