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Libération
TRIBUNE

Le patrimoine en conserve

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publié le 16 septembre 2005 à 3h43

Aux Journées du patrimoine, le week-end prochain, les châteaux, les maisons, les bâtiments industriels et bien d'autres sites, privés ou publics, seront livrés au regard de tous. Leur conservation soignée révèle l'acharnement contemporain à vouloir sauver de la dégradation et de l'oubli tout ce qui est en mesure de faire trace dans l'histoire. Contre l'angoisse des incertitudes que provoque l'avenir, la fébrilité de la sauvegarde s'exerce dans le blanchiment, le polissage, dans la restauration de ce qui devrait ne jamais disparaître. Et les gens prennent plaisir à visiter ces lieux qui leur présentent une histoire qui les fait rêver. On entend dire que l'histoire est finie, mais il reste cette jouissance de la rétrospection dans un décor patrimonial de plus en plus choyé qui offre au moins une garantie de sens au temps présent. L'idéal de l'homme est-il de devenir lui-même un objet patrimonial ?

Que chacun puisse un jour voir ce que l'autre conserve, tel est l'idéal de l'ouverture à «l'intimité patrimoniale». La patrimonialisation appelle une dynamique collective de la conservation. Si le patrimoine est le plus souvent privé, sa visibilité publique permet de croire qu'il soude la communauté, locale ou régionale. Le consensus établi autour de la nécessité de la restauration ne rencontre guère d'opposition parce qu'il apparaît comme la mise en oeuvre de la communauté elle-même. Présenté pour un temps limité au regard public, le patrimoine privé apparaît comme l'affaire de tous.