Trois signes récents semblent indiquer que nous sommes entrés dans une nouvelle ère économique, celle du postlibéralisme. D'abord, le début de reconnaissance par le président Bush à la tribune de l'ONU de l'origine économique et sociale du terrorisme et, en Louisiane, de l'existence d'une «pauvreté persistante» et d'une défaillance de l'Etat fédéral dans le pays parangon du libéralisme. Il est désormais clair que la liberté économique ne génère pas spontanément le progrès social. Ensuite, la parution du rapport de l'ONU sur le développement économique en Afrique qui remet en question la facilité intellectuelle qui consiste à imposer l'ouverture des économies comme préalable au développement, et l'efficacité même des investissements directs étrangers avant de recommander plutôt dans ces pays un renforcement du rôle des pouvoirs publics. Enfin, la prise de conscience planétaire de la fin de l'énergie inépuisable et bon marché qui devrait bousculer nombre de modèles économiques.
Il y a cinq ans seulement, l'économie semblait pourtant conclure l'histoire du monde. Notre théologien du libéralisme, Pascal Salin, dogmatisait que «la mondialisation, si elle contribuait effectivement à la destruction des Etats-nations, serait un bienfait pour l'humanité». Le philosophe allemand Jürgen Habermas était bien seul à oser souligner «qu'une des grandes conquêtes de l'Etat-nation est d'avoir instauré une forme abstraite de solidarité entre des citoyens auxquels la vie ne réserve aucun contact