A-t-il jamais été «moderne» ? Avec son crâne dégarni et ses tempes blanchies, Jean Poperen demeure dans l'album de famille du PS l'incarnation du gentil papy du socialisme auquel se réfèrent de loin en loin les petits-enfants turbulents qui continuent de se balancer des anathèmes de congrès. Son nom porte encore quelques étendards : celui de la laïcité, fil rouge, très rouge, de son engagement, mais aussi «intransigeance» doctrinale, voire «sectarisme», accusation dont il fut souvent l'objet.
Ecrire une biographie de cet ex-éléphant rose, disparu en 1997, étonne, tant son souvenir ne vit plus que dans quelques obscurs traités de cuisine interne au PS. L'un de ses disciples, Emmanuel Maurel, raconte cinquante ans de militantisme qui épousent l'histoire de la gauche. Car avant d'être authentiquement «ringard», archaïque et fier de l'être, Poperen fut furieusement de son temps : communiste à la Libération, PSU au début des années 60, rallié au PS mitterrandiste dans les années 70, jusqu'à se convertir en octobre 1981 au «compromis» plutôt que céder à la surenchère belliqueuse de ses camarades.
Mais cet agrégé d'histoire, théoricien enlevé du «front de classes», a aussi commis des erreurs d'aiguillage. La principale fut, à Epinay, de se refuser à Mitterrand qui lui fit payer ce «péché originel» : Poperen ne devint ministre qu'en 1988 avec la mission d'assurer des relations apaisées avec les parlementaires centristes, qu'il détestait, pour garantir la tranquillité du gouvernement R