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Libération
TRIBUNE

La France atteinte de morosité vinique

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par Christophe Girard
publié le 27 septembre 2005 à 3h51

La France part en vendange avec le sécateur mou. Le millésime précédent n'est pas vendu, le prochain s'apprête à célébrer le siècle de l'industrialisation. Plus personne ne veut brandir le rouge du drapeau tricolore. Boire tue. Personne non plus à la tête de l'Etat pour entendre, dans la cacophonie générale, un discours constructif. La viticulture, contrairement au reste de l'agriculture, n'a jamais su se désigner d'interlocuteur. Tout comme le consommateur face aux étiquettes compliquées, le gouvernement ne traduit plus le vigneron. On répond aux Bordelais parce qu'ils parlent plus fort que tout le monde. On calme les casseurs de péage parce que c'est un langage agricole attesté. Et désormais, au plus fort de la crise, ventre assoiffé n'a d'oreille que pour les chiffres. A combien d'hectolitres ai-je l'honneur ? Seule la voix du négoce tout-puissant trouve grâce aux oreilles du gouvernement. On va l'aider à instituer une marque «Vin de France». Une grande étiquette derrière laquelle viendraient s'engouffrer les raisins de l'Hexagone, tous paysages confondus.

Et le terroir ? Trop petit, trop cher, trop crypté. La parole est aux gigavolumes qui veulent se faire aussi gros que le boeuf au-delà des mers et jouer avec les mêmes armes imparables. Chimie, pharmacie, machinerie. Mais pas sur le même terrain : le leur a été pensé, pesé, planté pour l'industrie, la mécanisation et l'uniformisation. Le leur baigne de soleil et promet des millésimes égaux. Le leur est travaillé par une