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Libération
TRIBUNE

Brisseau, le faux coupable.

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publié le 10 novembre 2005 à 4h30

Le cinéaste Jean-Claude Brisseau est aujourd'hui accusé d'avoir profité de son statut de réalisateur pour «abuser», lors d'essais cinématographiques répétés, de jeunes actrices «innocentes». Qu'est-ce qu'on aurait dit si c'était Hitchcock qui avait été accusé à la place de Brisseau ? Imaginons la scène. Comme c'est l'une des scènes primitives du cinéma (et du cinéma de Brisseau, qui est un disciple et un adorateur de Hitchcock depuis plus de quarante ans), c'est facile à imaginer. Si Hitchcock avait été accusé d'intimidation ou d'agression sexuelle sur l'une des poupées blondes qu'il collectionnait (Grace Kelly, Kim Novak, Tippi Hedren), ces poupées Barbie censées répondre à tous ses désirs, toutes ses pulsions, même les plus secrets, les plus troubles, les plus «coupables», qu'est-ce qu'on aurait dit ? Comment aurait-on titré ?

On n'aurait rien dit parce qu'on savait à l'époque (on était moins cons dans les années 60, les années cinéma) que le film, ce n'est que du rêve, du fantasme, de l'imaginaire. Rappelons qu'après la naissance de sa fille Alfred Hitchcock n'a plus jamais eu de rapport sexuel avec sa femme, ni avec aucune autre femme. Il est redevenu vierge pendant quarante ans. On imagine les frustrations, les fantasmes, ils ont évidemment alimenté les chefs-d'oeuvre de l'un des plus grands cinéastes au monde. Aucune femme ne l'a plus jamais touché, pas plus qu'il n'en a touché une.

Un jour, il a craqué. Il n'en pouvait plus. C'était sur Marnie, son second film avec Tipp