La catastrophe qui a dévasté le Cachemire est une nouvelle plaie sur un corps déjà meurtri. La Grande Faucheuse a souverainement frappé une région du monde où, semée par l’homme, la mort accomplit chaque jour son effroyable et sale besogne. A condition de croire en Dieu, on pourrait penser que le Tout-Puissant a décidé d’entrer dans la compétition, pour montrer aux assassins en uniforme et aux terroristes blottis dans le secret à quoi ressemble un massacre digne de ce nom.
L’homme avait déjà amené le Cachemire au bord du gouffre tant de jeunes hommes brisés, de femmes abîmées, tant de villages écrasés, d’explosions, et tant de sang répandu sur la neige à jamais souillée, profanée. L’amertume liée à ce désastre naturel n’en est que plus obscène.
Et maintenant, pour couronner le tout, voilà l’hiver himalayen qui s’installe.
L’hiver cachemiri est aussi somptueux que cruel. La vallée emmitouflée dans son blanc manteau de saison, les lacs couverts d’une pellicule de glace, l’atmosphère diaphane annonciatrice des premières neiges... ce spectacle de toute beauté vous arrache des larmes qui se cristallisent entre vos cils. Contempler tout autour l’imposante chaîne de l’Himalaya, drapée dans sa blancheur telle une gigantesque oeuvre d’art signée Christo, c’est recevoir, encore et toujours, une saine leçon sur la petitesse de l’être humain. «Si le paradis existe sur la terre, écrivit jadis l’empereur Jehangir, il est ici, il est ici, oh il est ici !»
C’est également dans les hautes vall