Jacques Attali a des facilités de plume. En début de livre, la rubrique «Du même auteur» aligne 37 livres, répartis en six genres : Biographies, Romans, Mémoires, Théâtre, etc. Il semble écrire sous la poussée d'une force impérieuse et, à lire son Mitterrand, on croit entendre courir ses doigts sur le clavier. A toute allure, il décline les unes après les autres toutes les facettes d'un homme qui concevait l'exercice de la magistrature suprême comme un art total. Sur ordre du prince lui-même («Vous avez noté ça ? Et ça ?»), Attali fut le scribe officiel du régime. A l'approche du dixième anniversaire de sa disparition et alors que le filon éditorial sur l'ancien Président ne tarit pas, il veut reprendre le sujet en main. Faire oeuvre de synthèse. Fixer l'image.
Premier collaborateur de Mitterrand de 1974 à 1991, Jacques Attali raconte avec une jubilation contagieuse la phase de conquête du pouvoir et le premier septennat. De la sieste «fatale» qui décida de l'issue du duel télévisé avec Giscard en 1974 à son commentaire après la victoire de 1981 «les Français seront vite déçus ; il faudra agir très vite» , le spectacle du pouvoir reste fascinant et jouissif. Cinquante ans de manoeuvres politiques s'y condensent en quelques formules denses comme un diamant, tel cet avertissement à son cabinet : «Votre rôle principal consistera à décrocher la Légion d'honneur pour des gens qui, une fois qu'ils l'auront eue, chercheront à se brouiller avec vous pour se prouver à eux-mêmes que