Même d'en seulement écrire, les mots pèsent des tonnes. Mais de quoi aurait-on dû avoir peur, alors que, dès midi de samedi, les taches blanches de dizaines de cars policiers quadrillaient le quartier de la République et que, rue du Temple, s'installaient sur leurs pare-brise des grilles métalliques et s'ajustaient les sombres caparaçons des gardiens de l'ordre républicain ? A les dénombrer, à constater leur fébrilité latente, on se demandait quel fantasme de quel fondamentalisme valait tant de préventives précautions. Deux heures plus tard, une manifestation de quatre à cinq mille personnes (que la préfecture de police estimerait ultérieurement à 7 200), s'ébranlerait pour marcher jusqu'à la Nation contre les sataniques caricatures. Ce serait un cortège normalement ordonné, derrière des banderoles et sous des pancartes affichant en français des mots d'ordre oecuméniques et quelques autres, en arabe que nous ne lisons pas. Il semblait soucieux de ne pas jeter d'huile d'olive dans le vin de messe, mais avec ce qu'il fallait de Allah Akbar scandés, de voiles à peine ostensibles et de corans brandis pour établir que l'exégèse de l'islam nous est une bouteille à l'encre et l'islam lui-même (mais ne faut-il pas dire les islams, ou serait-ce déjà blasphème ?), un bateau ivre. S'y mesuraient, à des degrés divers, une «bonne foi» et une frustration sourde, qui sommaient de conserve la République laïque de légiférer ici pour le «respect des religions», là contre une «islamophobie», s
Impressions, bd Voltaire
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par Pierre Marcelle
publié le 13 février 2006 à 20h19
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