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Libération
TRIBUNE

Le juste prix de la justice

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par Valéry TURCEY
publié le 15 février 2006 à 20h21

Montesquieu a-t-il la télévision, au paradis des magistrats philosophes ? On ne lui souhaite pas. Il devrait d'urgence réviser sa théorie de la séparation des pouvoirs, au vu de l'étrange spectacle qui se déroule aujourd'hui dans son pays : une commission parlementaire menant ­ à charge ­ le procès de la justice, avec la bénédiction du gouvernement, sous l'oeil avide des caméras.

Les trois pouvoirs de l'Etat moderne (le législatif, l'exécutif et le médiatique) sont réunis pour stigmatiser le fonctionnement de l'autorité judiciaire. Des parlementaires, avocats de profession, ne résistent pas au plaisir de se changer en procureurs pour interroger les juges d'un ton sévère, et les admonester publiquement s'ils ne donnent pas les bonnes réponses. Les commentateurs de toutes tendances rivalisent de déclarations péremptoires sur la nécessité de modifier de fond en comble le système. Dans cette atmosphère quasiment révolutionnaire ­ tribunal populaire compris ­ on pourrait croire que de grandes réformes se préparent, et que la justice française va enfin être portée au niveau de celle des autres grandes démocraties.

Et pourtant, il n'en est rien. Les responsables politiques qui parlent de rebâtir le système judiciaire sont comme ces joueurs de poker aux poches vides qui tentent de faire bonne figure en relançant les enchères : ils bluffent.

Ils n'ont les moyens d'entreprendre aucune réforme d'envergure susceptible d'améliorer réellement les garanties des justiciables. L'Etat français c