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Libération
TRIBUNE

Le déséquilibre fait partie du legs de Rafic Hariri

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par René NABA
publié le 20 février 2006 à 20h24

Principal latifundiaire du pays, propriétaire de près du cinquième de la superficie d'un minuscule Etat de 10 000 km2, par ailleurs propriétaire d'un empire médiatique surpassant l'ensemble du parc libanais, disposant de surcroît d'une fortune personnelle supérieure au produit national brut, monopolisant en outre l'expression politique de l'islam sunnite libanais, Rafic Hariri était d'un calibrage conforme aux spécifications de ses mentors, son parrain saoudien et le protecteur américain de la pétromonarchie. Dans un pays désarticulé et segmenté en une multitude de communautés religieuses, sa protubérance paraissait inadaptée aux structures libanaises. A défaut de contrepoids, faute de balises, ce vizir qui se rêvait à la place du grand vizir, électron libre aux effets centrifuges, a pu paraître comme un facteur de déséquilibre, un instrument de déstabilisation pour le Liban et son voisinage immédiat.

Que le combat contre l'arbitraire ait été mené par cet homme-là qui s'est longtemps vécu abusivement comme le président effectif du Liban, un homme que les chrétiens accusaient en catimini d'«islamiser la terre libanaise» en raison de ses achats massifs de biens fonciers, participe d'un dévoiement de la pensée.

Que l'alliance entre l'un des rares dirigeants arabes se réclamant du socialisme, Walid Joumblatt, et un parfait représentant du pancapitalisme pétromonarchique proaméricain ait abouti au terme de son processus, en juin 2005, à l'éviction de la scène politique de l'ancien