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Libération

Une leçon d'Allemagne

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publié le 20 février 2006 à 20h24

D'un côté, il y a le vacarme extravagant que font les stratèges du Pentagone et des états-majors coalisés pour justifier l'invraisemblable gestion, depuis deux ans, du dossier Torture sur la ligne Guantanamo-Abou Ghraib. De l'autre, il y eut, mercredi dernier, la décision de la Cour constitutionnelle allemande de s'opposer à une loi, entrée en vigueur début 2005 et autorisant l'armée à abattre des aéronefs civils détournés à des fins terroristes. Soit, contre la sorte de banalisation du mal que révèlent les images toujours plus barbares auxquelles force est de constater que les opinions bon gré mal gré s'habituent (inéluctables horreurs de la guerre, n'est-ce pas...), le providentiel sursaut d'un Etat de droit. Dans les vagissements du millénaire nouveau, se confrontent et s'opposent ainsi deux conceptions de ce qui nous reste de «dignité humaine». C'est bien celle-ci que les juges allemands invoquent en effet comme principe : «On ne tue pas des innocents de manière programmée», disent-ils (fût-ce pour en protéger d'autres est sous-entendu), arguant que «en disposant unilatéralement de la vie (des passagers) au nom de l'Etat, on conteste à ces victimes la valeur qui revient à l'homme». Et de préciser que, même sans passager ou ne véhiculant que des terroristes, un appareil ne saurait être abattu sans modification de la Loi fondamentale. Dans cette leçon de morale et de dignité venue d'outre-Rhin nous apparaît comme surtout remarquable le fait qu'elle nous vient d'outre-Rhin,