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Libération
TRIBUNE

Les prédateurs ont gagné

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publié le 2 octobre 2006 à 23h31

Le 1er octobre 1996, Genève et son université. Sept magistrats alignés le long d'une table et moi à un bout. L'initiative était privée. A aucun moment un gouvernement, un Parlement ou une commission, fût-elle européenne, ne s'en étaient mêlés. Des esprits peu éclairés craignaient une république des juges. Votre appel de Genève, c'est de la bonne publicité, non ? Le livre, initiateur de l'appel, partait comme des petits pains. Son titre, la Justice ou le chaos, sonnait comme un ultimatum. L'appel de Genève a fait grand bruit... Il y a eu des tas d'autres appels suite au nôtre. On venait de lancer une mode. Dix ans déjà. Autant dire une petite éternité.

L'ouverture des journaux télévisés, la Marche du siècle, des échos jusqu'au Japon... «Des juges européens s'élèvent contre la corruption»... Bertossa et Van Ruymbeke avaient été les plus assidus et les plus motivés. Le procureur général Jiménez était trop pointilleux, Baltasar Garzón, qui plus tard coincera Pinochet, avait été parfait. A l'époque, on n'échangeait aucun mail. Colombo et Bruti Liberati, les Italiens, étaient les plus lents, et Dejemeppe, le procureur de Bruxelles, voulait toujours ajouter un article sur la fiscalité. Au début, notre «charte» faisait une vingtaine de pages. Trente versions plus tard, nous étions parvenus à ce plus petit dénominateur commun : une page. Tous ces juges souffraient en silence du même mal. Ils étaient armés pour coincer les voleurs de poule, mais incapables d'inquié