«J'accuse certains juges, militaires, diplomates, hommes politiques français, d'avoir tenté de taire l'assassinat d'un magistrat français en mission pour la France dans un pays étranger ; d'avoir intoxiqué l'opinion publique en privilégiant une thèse du suicide, grossière ; d'avoir accablé la veuve de ce magistrat en la faisant passer pour folle.» Et aussi d'«avoir protégé un régime politique totalitaire», et encore d'«avoir poussé le cynisme jusqu'à soutenir ce régime». Et d'avoir, d'avoir, d'avoir...
La liste des accusations qu'Elisabeth Borrel dresse en épilogue de son livre se veut acte de justice, un de ces réquisitoires implacables par lesquels les procureurs décrivent le crime et réclament des châtiments. Son mari, Bernard Borrel, dont on a cherché à déguiser l'assassinat en suicide, était procureur. Et elle, est magistrate. Elle connaît le poids des mots.
S'il n'y avait pas eu cette veuve, sa colère, son opiniâtreté, sa droiture, il n'y aurait jamais eu d'«affaire Borrel», le plus grand scandale diplomatique entre la France et Djibouti, son ancienne colonie. Il n'y aurait eu que la souffrance intime d'une famille qui a perdu l'un des siens d'une mort douloureuse pour ceux qui restent, le suicide.
Onze ans après la mort de son mari, dans la nuit du 18 au 19 octobre 1995, Elisabeth Borrel a pris la plume, avec la collaboration du journaliste Bernard Nicolas, pour raconter son combat. Comment ce matin d'automne, le consul de France vient lui ann