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Libération
Critique

Royal, la politique de la vie

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par Zaki Laïdi et Gérard GRUNBERG
publié le 20 novembre 2006 à 0h09

Evénement majeur dans la vie de la Ve République, une femme, modérément impliquée dans la vie partisane et non programmée pour la magistrature suprême, est désignée par son parti, alors que personne ne l'attendait, candidate à l'élection présidentielle. On pourra expliquer le succès de Ségolène Royal par l'influence des médias et la victoire de la démocratie d'opinion sur la démocratie de parti. Les choses ne sont pas si simples. Si la démocratie d'opinion a influencé le choix des militants, elle a aussi renforcé le PS grâce à l'apport d'adhérents nouveaux. De fait, le vote pour Royal coagule deux types de soutiens : celui des nouveaux militants avides de renouvellement et celui de l'appareil du parti, soucieux de prévenir une nouvelle défaite.

Ségolène Royal a compris que pour représenter les Français, il fallait d'abord s'identifier à eux, leur apporter la preuve qu'elle pouvait les incarner au-delà des clivages partisans. Mais elle le fait sur un mode nouveau : elle construit subtilement son autorité, moins sur le mode surplombant («suivez-moi car je suis la meilleure»), que sur le mode intersubjectif («suivez-moi car je me reconnais en vous»). Ce n'est plus le pouvoir conquis sur un principe d'autorité mais sur celui de l'interactivité. Cette capacité à incarner renvoie plus à une symbolique qu'à une réalité tangible, celle de l'enracinement et de l'autorité. En défendant les terroirs, les régions, Ségolène Royal, comme jadis François Mitterrand, cherche à s'identifier à