L'affaire Redeker constitue la régression d'un principe fondamental de la France : la liberté de l'esprit. Ce professeur de philosophie dans un lycée des environs de Toulouse, objet d'une fatwa pour un article paru dans le Figaro début septembre, n'a jamais bénéficié du soutien unanime d'un Salman Rushdie, condamné lui aussi à mort pour blasphème par les religieux d'Iran en 1989, à la suite de la publication des Versets sataniques. Au contraire. La gravité de la chose aurait dû entraîner une solidarité inconditionnelle, quoiqu'on pense de l'article incriminé. Mais lâché par ses collègues de l'Education nationale et son ministre de tutelle, oublié par la quasi-totalité des politiques, Redeker a dû en plus subir les prêches et les sarcasmes de ceux qui prétendaient l'aider. Feignant de protester contre son sort, ces derniers, avec une rare bassesse, s'empressèrent d'ajouter qu'il l'avait bien cherché. L'islamologue officiel de l'Etat français, Olivier Roy, après avoir dénoncé le «tissu d'imbécillités» du texte de Redeker, accusait ce dernier d'avoir «chatouillé la fatwa», manière d'avertir quiconque écrit sur l'islam qu'il doit s'autocensurer sous peine d'encourir le châtiment suprême; le Mrap, égal à sa réputation, avertissait Redeker que s'il était mis à mort un jour, il n'aurait à s'en prendre qu'à lui-même; quant à l'historien Jean Beaubérot, il comparait notre philosophe ni plus ni moins au pamphlétaire antisémite de la fin du XIXe siècle Edoua
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Une fatwa au pays de Voltaire
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par Pascal BRUCKNER
publié le 21 novembre 2006 à 0h10
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