Si les enseignants votaient majoritairement à gauche jusqu'à la présidentielle de 2002, ce n'est pas pour des raisons corporatistes, mais parce qu'il existait un pacte historique entre la gauche et l'école. On choisissait le métier d'instituteur ou de professeur parce que l'instruction était une valeur fondamentalement de gauche.
L'instruction des enfants des milieux populaires était un impératif de la lutte contre l'idéologie dominante. Jusqu'au début des années 60, les municipalités de la couronne rouge, en banlieue parisienne, ne ménageaient pas leurs efforts en faveur de la jeunesse, à la fois par l'éducation et les activités de loisirs. Mais dans les décennies qui ont suivi la politique d'urbanisation a entraîné une ségrégation spatiale dans les banlieues. On a construit de grandes cités pour parquer les populations immigrées. Durant cette période, les HLM de la ville de Paris construisaient des immeubles dans certaines communes de banlieue...
La ghettoïsation multiethnique a peu à peu induit une paralysie de l'école. Comment enseigner dans une classe comprenant quasi exclusivement des enfants issus de cultures diverses ? L'école de la République ne peut plus suivre son modèle traditionnel d'assimilation. Autrefois, les enfants d'origine immigrée (Polonais, Italiens, Espagnols, Portugais) côtoyaient dans leurs classes une majorité de jeunes Français, et de ce fait partageaient le même mode de socialisation. L'apprentissage de la langue française ne résultait pas exclusive