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Libération
TRIBUNE

Le temps, allié des bourreaux

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publié le 8 janvier 2007 à 5h19

La précipitation, s'agissant du jugement des plus grands bourreaux, est toujours synonyme d'un lynchage judiciaire. Non seulement la pendaison immonde de Saddam Hussein n'est pas, comme semble le croire George W. Bush ­ mais qui le croit aujourd'hui encore ? ­ un acte fondateur de la démocratie, mais, au contraire, un acte qui en ruine un peu plus les fondations déjà bien délabrées en Irak. A Bagdad, la mascarade de procès a abouti à un triple fiasco. La vérité des faits, le travail de mémoire, le respect des victimes, et notamment des Kurdes, se sont volatilisés dans la trappe, antichambre dorénavant de toutes les frustrations et falsifications.

A l'inverse, l'étirement du temps nuit gravement à l'oeuvre de justice quand elle est rendue au nom de l'humanité. Après le coup d'éclat du juge Baltasar Garzón, en septembre 1998, et le placement en résidence surveillée d'Augusto Pinochet à Londres, une onde de choc a parcouru et parcourt encore la planète. L'action des juges européens a réveillé une justice latino-américaine endormie et craintive. Poussés par les victimes et les ONG, les juges chiliens et ensuite argentins, escortés par le droit international pénal, jusque-là ignoré, ont inculpé, parfois incarcéré, des tortionnaires qui vivaient une retraite paisible. Une conviction commune est née, le temps ne pouvait plus être un gage d'impunité pour les plus grands tortionnaires. Le caractère imprescriptible du crime contre l'humanité et l'admission par le droit international de