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TRIBUNE

Lustiger, le converti permanent

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Le cardinal a porté l'idéal millénaire du christianisme : amener les juifs à reconnaître la Nouvelle Alliance.
publié le 13 août 2007 à 9h09

Le trait singulier du cardinal Lustiger, c'est qu'étant juif et s'étant converti au christianisme (deux choses banales ou sans éclat particulier), il a dû maintenir toute sa vie qu'il était juif alors que le passage au christianisme, en principe, est fait pour dépasser ou accomplir l'être juif. En tout cas pas pour le maintenir. Et lui a dû le maintenir parce que sa mère, gazée comme juive à Auschwitz, l'a comme rappelé à ses origines, d'un rappel radical mais voué à rester formel. Car de fait, toute sa vie, toute l'énergie de son action fut orientée vers la foi catholique, à propager le plus possible. Pour le reste, il a fait son travail d'homme d'Eglise actif et militant pour sa religion. Apparemment c'est assez rare pour paraître exceptionnel.

En revanche, ce qui est exceptionnel, c'est cette conjonction des deux traits, juif et catholique qui lui fut imposé par l'événement ; imposé par le destin de sa mère et en un sens celui de son peuple ; indépendamment de sa volonté.

Conjonction certes bizarre : «être catholique», cela contredit radicalement «être juif». «Jésus notre Dieu» n'est pas recevable par un juif religieux pas plus que par un juif athée.

Mais cette conjonction bizarre, il a su s'en servir, l'incarner, car elle correspond à un montage théorique presque idéal : porter en soi un juif qu'on ne cesse de convertir au catholique qu'on est devenu, un juif qui ne demande qu'à passer chrétien et qui y passe toute sa vie, voilà ce qui ne pouvait que séduire le subtil Jean-