Mikhaïl Saakachvili n'est pas le seul coupable. Ses responsabilités sont immenses. Il s'est lancé à la reconquête de l'Ossétie sécessionniste sans penser le coup d'après, sur un coup de dés,sans être certain que l'Occident l'appuierait face à l'inéluctable réaction russe. Il a créé une crise internationale de première ampleur et mené son peuple à une défaite assurée, mais la profondeur même de cette aberration dit qu'elle ne peut pas relever de sa seule erreur.
Ces trois jours de guerre, ces destructions, ces morts inutiles sont aussi le fruit de l'incohérence de l'Europe et des Etats-Unis face à la Russie, de leur constante volonté de la contrer sans en avoir les moyens ni, surtout, de vraies raisons de le faire. Dans ce conflit, le problème de fond est que, depuis qu'elle a rebâti un Etat, repris le contrôle de ses matières premières et rompu avec l'alignement diplomatique d'Eltsine sur les Etats-Unis, la Russie inquiète Washington et l'Europe centrale.
L'Amérique craint que son ancien adversaire de la guerre froide ne redevienne un rival, fort de son immensité, de son pétrole, de son réarmement et, donc, de sa capacité à peser sur les affaires du monde. Malgré leur entrée dans l'Union européenne, les Etats baltes et les anciens satellites soviétiques vivent, eux, dans l'angoisse d'un retour de l'impérialisme russe et, surtout, d'une alliance entre la «vieille Europe» et le Kremlin dont ils se voient déjà victimes, sacrifiés sur l'autel énergétique par Paris, Rome et Berlin.