La Confédération vivrait-elle donc des heures douloureuses? Le colonel Kadhafi a proposé à l'ONU de la démembrer en représailles à l'interpellation d'un de ses fils par la police cantonale de Genève pour violences domestiques : un cubitus et un radius à l'Allemagne, le genou gauche… à l'Italie et l'omoplate droite à la France. Par-dessus le marché, le secret bancaire n'est plus. Les avis de décès sont partout dans la presse helvétique. Le district de la Gruyère (40 000 habitants), dans le canton de Fribourg, est un bibelot alpestre. Une géographie veinée de troupeaux, une douce mamelle restée à l'abri de toutes les contagions qui agitent le pays. «Nous n'avons rien à vendre, que du fromage. Notre paysage est gratuit et c'est aussi notre fonds de commerce», André Gachet, instructeur de vol responsable de l'aérodrome. «Dédé» Gachet est natif du village de Gruyères (là avec un s) : son château fort, sa salle des gardes, son escalier en colimaçon, et ses parapets au-dessus desquels se penche le voyageur pour découvrir un jardin de buis disciplinés et de bruyères d'un mauve ecclésiastique en cette fin d'été.
La Gruyère est d'une certaine façon la pompe à images de tout le pays. «800 000 touristes y défilent chaque année. C'est une des icônes du pays et un puits de nostalgie pour tous les Suisses, un reste de civilisation paroissiale et pastorale», raconte Patrice Borcard, historien, écrivain et ancien rédacteur en chef du trihebdomadaire La Gruyère édité