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Randonnée

Sous les crêtes de l’Estelle, une montagne de fer

Dans le Vallespir, sur le versant sud du Canigou, une randonnée entre ciel et terre sur le pic de l’Estelle.

La tour à signaux de Batère date du XVe siècle. (Oswaldo Rubio / Flickr)
Publié le 20/06/2016 à 10h33

De loin, le refuge de Batère semble éventrer la forêt de pins sylvestres de sa massive silhouette de béton gris. De près, si un nuage masque le soleil, sa longue façade percée de fenêtres a de faux airs d’hôtel hanté qui n’aurait pas déplu à Stanley Kubrick. Derrière cette austère entrée en matière, débute un sentier de crêtes aux panoramas enchanteurs en direction du pic de l’Estelle, à 1778 mètres. La montagne dissimule un dédale de galeries et de silos souterrains: des mines de fer exploitées depuis l’Antiquité jusqu’à la fin des années 1980. Les derniers mineurs logeaient dans le bâtiment à l’abandon qui abrite désormais le refuge, dans l’une de ses extrémités. Un câble aérien de 9 kilomètres transportait le minerai jusqu’à Arles-sur-Tech au fond de la vallée, aujourd’hui point de ralliement pour la plupart des randonnées sur le versant sud du Canigou.

Paysage du Vallespir. Crédit photo: Albert / Flickr

Notre balade commence sur une estive à 1500 mètres d’altitude, sur le GR 10. Des blocs de schiste bruns et des massifs plats de genévriers vert sapin mouchettent l’herbe rase. Quelques brebis baguenaudent au loin. Des éleveurs-producteurs de fromage du Vallespir laissent vagabonder leurs bêtes ici dès le mois d’avril. Une montée franche amène au col de Cirere où le GR 10 file vers le sommet du Canigou. Notre sentier préfère les crêtes vers le pic de l’Estelle, dans une atmosphère bucolique, accentuée au printemps quand les silènes, les primevères élevées et les genets éclaboussent la prairie de rose et de jaune. La vue sur la mer et les cimes, françaises et espagnoles, est saisissante.

Une tour à signaux du XIVe siècle, toujours debout au bout de la crête, exploitait cette position stratégique. Fumée la journée, flammes la nuit : elle alertait, via un ingénieux réseau de tours, Perpignan à l'époque du royaume de Majorque et surtout Barcelone, pendant la période de la Couronne d'Aragon. L'édifice domine une opulente hêtraie qui s'épanouit dans la fraîcheur du versant nord. L'itinéraire de retour emprunte une piste forestière sur le versant sud, piquée de mélèze dénudés et de bouleaux argentés avant de retrouver la forêt de pins sylvestres. Des essences plantées pour lutter contre l'érosion des sols provoqués par l'activité minière et l'alimentation des forges.

Reportage réalisé avec le concours de La Balaguère.

La Balaguère propose un circuit en groupe accompagné de 7 jours autour du Canigou, incluant son ascension, avec 5 à 6 heures de marche par jour. Hébergement en hôtels, gîtes et refuges. Entre juin et septembre, à partir de 595€.