Pour éviter les tueries de brebis et d’autres bêtes d’élevage par l’ours en montagne, une multitude de solutions sont préconisées par les acteurs locaux ou les pouvoirs publics. Sans faire l’unanimité parmi les paysans ou les associations de défense de l’animal.
1/Fixer les bergers. Cet été, sept cabanes en bois ont été installées sur des zones pastorales dites «à risque» dans l'Ariège. Leur coût de fabrication (15 000 euros pièce) et le transport en hélico ont été intégralement financés par l'Etat. De même qu'est pris en charge le salaire des «bergers d'appui», des professionnels qui épaulent les éleveurs demandeurs. Pour les pouvoirs publics, en effet, le berger est la figure centrale de la lutte contre les prédations.
2/Effrayer l'intrus. Jet de pétards, projecteurs braqués dans les yeux… Depuis juin, les éleveurs ariégeois qui ont subi une attaque au cours de l'année sont autorisés à «effaroucher» l'assaillant. En cas de récidive, ils peuvent tirer avec des balles en caoutchouc ou des projectiles à double détonation (qui éclatent avant de toucher leur cible). Les associations pro-ours, elles, dénoncent ces perturbations visant l'animal. Et les organisations paysannes sont peu convaincues : les spécimens «effarouchés» sont revenus quelques jours plus tard.
3/Lancer les chiens. Le fameux patou des Pyrénées ne suffit plus : ces derniers mois, plusieurs chiens de troupeau ont été tués ou portés disparus. Faut-il améliorer leur dressage (certains étaient inexpérimentés) ? Les munir de colliers avec des piques en métal ? Voire opter pour une nouvelle race ? Certaines espèces utilisées par les bergers italiens seraient plus aguerries face à l'ours… mais aussi face à un randonneur égaré, s'inquiète la Confédération paysanne, qui souhaite privilégier le patou local.
4/Fermer les enclos. C'est l'un des trois volets du «triptyque idéal» martelé par les pouvoirs publics. Avec le berger et son chien, la clôture électrique jouerait un effet dissuasif. Mais comment barriérer des zones longues de plusieurs kilomètres ?
5/Rassasier l'ours. L'idée est d'éviter que le plantigrade se serve en chair fraîche. La chambre d'agriculture de l'Ariège propose donc de constituer des réserves constituées d'animaux morts, à l'écart des troupeaux : soit du «nourrissage par charnier». A l'inverse, le «plan ours» 2019 du gouvernement prévoit de planter des mûriers et myrtilliers («zones forestières enrichies en ressources végétales»), estimant que les charniers «présentent un risque d'accoutumance des ours à la présence humaine et d'augmentation de la dangerosité de l'animal».
6/Suivre à la trace. Cet été, l'Etat a mis en place des alertes SMS à destination des éleveurs, bergers et élus locaux. Il s'agit de localiser les ours sur la base de relevés GPS (10 % des spécimens sont équipés d'une balise) et d'observations à la jumelle.
7/Eloigner. Capturer l'ours et le relâcher loin des troupeaux ? La représentante de la FNSEA en Ariège exige «le retrait» de la population de plantigrades dans sa totalité. Si les autorités ont déjà transféré des individus menaçants vers d'autres points des Pyrénées, le protocole «ours à problème» ratifié en 2010 par le préfet de région entend limiter ces opérations, jugées trop peu efficaces : «L'ours transplanté peut devenir à nouveau un problème sur la zone où il est relâché, ou même revenir sur le site d'origine où il a été capturé.»
8/Tuer. C'est le tabou ultime : la «destruction directe». L'option est prévue par l'Etat seulement si les solutions alternatives échouent (comme la pose d'un émetteur GPS afin d'anticiper les mouvements) ou si l'animal s'en prend à l'homme. La chambre d'agriculture de l'Ariège appelle à «envisager des tirs létaux en cas d'attaques de troupeaux», arguant que la France autorise l'abattage de 100 loups par an. Le protocole «ours à problèmes» restreint cette hypothèse à des cas rarissimes, une «situation extrême ne pouvant être résolue autrement». De fait, aucun ours n'a été tué par les pouvoirs publics dans les Pyrénées depuis les années 60.