Ils sont dingues, comme leur aventure. Matthieu Belanger, 32 ans, et Loury Lag, 33 ans, reviennent de loin. Un passé de petite délinquance et de drogue. De parfaits «bad boys» qui s’attaquent désormais à une aventure qui ressemble à un exploit. De gens qui ont tutoyé les abîmes, on n’attendait pas moins…
Comme Matthieu et Loury sont de petits malins, ils ont pris leur bâton de pèlerin pour aller convaincre des marques – dont certaines, comme le dit Loury, dépensaient «des milliers d'euros pour aller shooter un slip en Antarctique» – de les soutenir. Le projet «Icarus» s'énonce ainsi : «Sept ans, sept chapitres, sept sommets.» A savoir l'Everest en Asie, l'Aconcagua en Amérique du Sud, le Denali en Amérique du Nord, le Kilimandjaro en Afrique, l'Elbrouz en Europe, le massif Vinson en Antarctique et le mont Kosciuszko en Australie… Les sept montagnes les plus élevées de chacun des sept continents. Bref, un tour du monde sans moteur, avec leurs mollets et leurs pieds.
Dernière chronique parueEverest, vous avez un message…
Les deux compères le savent, il faut prouver aux marques qu'ils ont «déjà fait des choses», qu'ils en ont sous la semelle. Ils le doivent car l'addition monte à 300 000 euros. Il faut dire qu'ils comptent bien faire venir leur progéniture sur les étapes car, comme ils le soulignent avec humour, «il faut ménager les épouses».
Matthieu et Loury savent que leur passé constitue un atout. «On s'est construits, on est devenus forts mentalement. Notre marginalité nous permet de nous dépasser. Dans des conditions complexes, être sur le fil, cela aide.» Paradoxe. Et puis, ils croient aussi savoir que tout le monde en «a marre du lisse, les vraies gens ne sont pas sans histoires. On en a bavé mais on a un gros mental».
Ténacité et rage
Loury a un «seuil de douleur plus lointain que les autres». Son père tapait, il a vécu dans la rue, fait des arrêts cardiaques. Chez lui, il y a cette «notion de l'adrénaline», la permanente mise en danger. Il résume ceci : «En grandissant, on canalise cette recherche de limites, on se trouve moins dans l'autodestruction.»
Ils racontent se lancer dans un truc dix fois plus grand qu'eux, «on nous a expliqué qu'on n'était pas des professionnels, certains équipementiers ne nous ont pas pris au sérieux»… Bref, ils ont parfois été «pris de haut». Certes poursuivent-ils, «on n'est pas exceptionnels. Mais on possède davantage de ténacité, de rage. On va prendre des risques».
Ils ont gros morceau à venir. Le Denali, en Alaska, anciennement mont McKinley, avec un «pied de voie très galère à rejoindre, un début d'été marécageux, où cela monte très fort. Personne ne l'approche à pied mais nous allons monter avec les skis sur le dos, puis effectuer une grande descente de free de 6 200 à 300 mètres sur des pentes bien gelées.» Et comme le dit Matthieu, philosophe et serein : «J'ai accepté d'être heureux. C'est une décision. Ce qui se passe autour a peu d'influence, cela a ouvert mon esprit, mes envies. Quand on s'est libéré de ce qu'on traîne, on peut arriver au dépassement de soi. Je crois être passé de la destruction à la construction. Bref, l'énergie n'est pas placée au même endroit.»