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La mobilisation contre la loi travail fait hésiter le gouvernement

La forte mobilisation, ce jeudi, contre la loi Travail a-t-elle changé la donne ? Face à la colère de la rue, le gouvernement – déjà affaibli par sa marche arrière sur le projet de réforme constitutionnelle – semble désormais avancer à tâtons.
Paris, le 24 mars 2016 : une chanteuse entre Place d'Italie et Montparnasse. (Photo Martin Colombet. Hans Lucas pour Libération)
publié le 1er avril 2016 à 18h32

Entre 390 000 (selon la police) et 1,2 million (d'après les syndicats) dans les rues ce jeudi, en nette augmentation par rapport aux rassemblements du 9 mars. Les chiffres restent certes fluctuants, mais le constat paraît clair : pour la première fois depuis le début de la mobilisation contre la loi travail, le gouvernement a clairement été mis sur le reculoir. Et, si la rue avance, l'exécutif paraît, lui, hésitant.

Déjà moqué pour son volte-face sur la question de la déchéance de nationalité, François Hollande n'avait pas besoin de cela. Les efforts de son équipe gouvernementale, embourbée dans ses atermoiements, ressemble de plus en plus à un chemin de croix.

Les mêmes mots reviennent en boucle dans la bouche de Manuel Valls ou de Myriam El Khomri : il faut «convaincre» et «clarifier les règles». Une ligne de conduite que peine à suivre la ministre du Travail, capable de se contredire à quelques secondes d'intervalle sur le plateau de BFM TV quant à de possibles modulations de sa loi en fonction de la taille des entreprises.

L'opposition, pourtant hétéroclite, affiche de son côté parfaitement ses intentions. Chez Les Républicains, par le biais d'Eric Woerth, on évoque un texte de départ séduisant mais qui a été, au gré des négociations, «vidé» de sa substance et donc «dénaturé».

Sur l'aile gauche du gouvernement et chez les syndicalistes, les mots sont encore plus tranchés. Avant de défiler, le secrétaire général de Force ouvrière Jean-Claude Mailly annonçait jeudi matin sur Europe 1 que «le mot d'ordre de la journée [du 31 mars], c'est d'obtenir le retrait du projet de loi travail». Et révélait déjà que de nouvelles dates de mobilisation devraient suivre les manifestations de la journée : «Ce n'est pas un baroud d'honneur, pas du tout. On est rentré dans un bras de fer.»

Des termes forts qui ont eu un écho tout particulier au sein de cortèges fournis, où salariés et syndicalistes ont – malgré une météo capricieuse dans certaines villes – marché vent debout contre le projet de réforme.

Face à la grogne (une pétition en ligne avait déjà réuni plus d'un million de signatures), Philippe Martinez appelait l'exécutif à écouter les protestataires : «Il faut que le gouvernement prenne en compte ce qu'il se passe dans la rue, ce qui se passe dans les entreprises. Je crois qu'il y a beaucoup beaucoup d'appels à la grève.» Des propos du secrétaire général de la CGT repris par les anonymes, pour qui «il n'est jamais trop tard» pour faire reculer le gouvernement.

Si les rassemblements ont, comme à Paris, Nantes ou Toulouse, parfois été émaillés de débordements, l'importance de la mobilisation semblait, vendredi, avoir déjà fait quelque peu fléchir Matignon. Dans une allocution, prononcée depuis Orléans, Manuel Valls se disait ainsi «prêt et décidé à regarder» les propositions de l'Unef.

Un pas vers les jeunes, un pas pour calmer les esprits, mais pas forcément une avancée. Rappelons que le Premier ministre a déjà rencontré William Martinet à Matignon le 11 mars dernier : à l'issue de leur entretien, le leader du principal syndicat étudiant de France avait alors appelé à une «amplification» de la mobilisation, jugeant que «Manuel Valls (n'avait) pas envie de modifier, ou de faire bouger fortement» le texte.

Pour Marie-Noëlle Lienemann, classée parmi les «frondeurs» du Parti socialiste, «c'est comme d'habitude : pas de dialogue». Après l'échec de la réforme de la Constitution, la sénatrice de Paris appelait François Hollande à abandonner purement et simplement la loi El Khomri : «Au bout d'un moment, est-ce qu'il vaut mieux reculer ou persister quand on fait une erreur ? Parce que, au bout du compte, où est le plus grand discrédit ?»