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Nuit debout, un mouvement qui prend de l'ampleur

Ils ont commencé à se rassembler le 31 mars sur la place de la République, à Paris, avant d'essaimer à travers la France. Pour ces jeunes et moins jeunes résolus à «se réapproprier la parole et l'espace public», le mois de mars n'a jamais vraiment pris fin. Nous sommes le «#45 Mars».
Paris, 9 avril 2016. Nuit debout. Rassemblement place de la République contre la loi sur le travail de la ministre Myriam El Khomri. (Photo Marc Chaumeil pour Libération)
publié le 15 avril 2016 à 7h53
(mis à jour le 15 avril 2016 à 12h06)

La spontanéité du rassemblement, au soir d'une journée de défilé contre le projet de loi travail de Myriam El Khomri, a immédiatement fait penser au mouvement des «indignés» espagnols à Madrid ou à celui d'«Occupy Wall Street» à New York.

D'abord à Paris, et désormais à Strasbourg, Lyon, Nantes, Toulouse ou Rennes, les partisans de ce mouvement citoyen s'assoient, s'écoutent et débattent chaque soir. Avec un unique mot d'ordre : «Se réapproprier la parole et l'espace public».

Doucement mais sûrement, «Nuit Debout» prend de l'ampleur. De source policière, la place de la République aurait ainsi accueilli 20 000 personnes le week-end dernier. Si les autres villes peinent parfois à mobiliser en masse, l'essentiel est ailleurs.

Pour Frédéric Lordon, économiste devenu porte-parole officieux du mouvement, l'initiative vise à «changer les règles du jeu» en proposant un contrepoids crédible au pouvoir exécutif en place. Devant un large parterre d'auditeurs, le directeur de recherche au CNRS exposait le 3 avril dernier sa vision des choses : «Je dis qu'il faudrait que nous écrivions notre constitution, la constitution de la République sociale, qui est l'exact contraire de la République d'aujourd'hui.»

Surtout, «Nuit Debout» attire les médias de France et d'ailleurs, retenant de fait l'attention des représentants politiques. A l'image d'Axelle Lemaire, Jean-Christophe Cambadélis ou Benoist Apparu, certains élus se sont ainsi fondus dans la foule pour prêter une oreille aux débats.

Dans cette classe politique, les avis divergent. Quand Ségolène Royal voit dans cette mobilisation un signe «positif», le député Les Républicains Luc Chatel moque le gouvernement : «Ce mouvement, c'est un peu l'arroseur arrosé. Qui sont ces jeunes ? [...] Ce sont ceux qui ont cru au discours de François Hollande au Bourget en janvier 2012, et qui ont été trahis.»

A l'heure où le mouvement entre dans sa troisième semaine, la délocalisation des agoras de la place de la République vers la gare Saint-Lazare en début de semaine ou l'argument de l'état d'urgence brandi par ses détracteurs semblent n'y rien changer : «Nuit Debout» serait bel et bien en marche.