Dans la famille, la cuisine est une maladie héréditaire. Pascale
Boissier, 35 ans, succède à sa grand-mère puis à son père dans un métier où on a la fierté de mettre son nom sur son tablier. «J'ai été élevée dans un restaurant, près de la chaleur du fourneau», raconte la jeune femme qui pratique avec vivacité le pied de cochon aux escargots ou le foie de veau déglacé au frontignan dans sa Table d'Hippolyte, petit bistrot de la Presqu'île. L'atavisme culinaire est entré dans l'histoire lyonnaise avec les légendaires familles Lacombe (Léon de Lyon), Lassausaie, ou la saga des Bocuse dont le plus notoire, Paul, est le rejeton d'une lignée ininterrompue depuis 1765. La ville de la charcutaille et de la cochonnaille doit sa réputation gastronome à des générations de femmes, les «mères», de Léa à l'illustre Brazier. Cette maternité généreuse à bras et casseroles ouverts se fait rare. Les cuisinières d'antan sont en voie d'extinction. Pascale Boissier explique cette disparition par une évolution du système de transmission des savoirs: «Le système d'apprentissage et de formation passe désormais par les écoles, et cet univers est particulièrement machiste.» Elle travaille avec son frère, qui, lui, est en salle. Elle manie les lourdes poêles avec aisance, pare au coup de feu avec allégresse, «je chante du Nicoletta en cuisine», et ne boit «que du champagne». Elle sert la dorade royale en crapaudine, des crevettes à l'ail, et sait se livrer aux classiques lyonnaiseries telles que le tab