Bordeaux envoyée spéciale
On appelle ça des bassins à flot, mais quand on dit bassins, il faut plutôt imaginer des plans d'eau. Presque trois kilomètres de quais pour faire le tour. Des quais larges, vides, des hangars bas, désaffectés parfois, des usines. De la rouille, du vent, de l'abandon. Et cette eau étale. Aux Bassins à flot de Bordeaux, on est ailleurs.
De l'avis général, on pourrait être un jour sur les Docklands de Londres. Le lieu est formaté pour attirer «un monde un peu culturalo-branchouille», comme dit l'architecte Antoine Grumbach, qui a élaboré un premier plan d'aménagement du site. «Ce n'est pas par hasard, ajoute-t-il, que l'agence d'urbanisme s'est installée là-bas.» Des pionniers ont en effet pris racine sur place. Dans un hangar désaffecté, le G2, les architectes Brochet, Lajus, Pueyo ont mené une réhabilitation qui loge aujourd'hui «des graphistes, des architectes, un journal, un négociant en vins, une ruche, quoi...», résume Olivier Brochet. Au vu des demandes, estime-t-il, «des G2, on peut encore en aligner cinq comme ça». C'est dire si le site apparaît prometteur.
La promesse est un peu virtuelle. Ce bout de port est «dans son jus», comme disent les architectes. Ni rénové, ni nettoyé, ni aménagé. C'est bien cela qui donne à l'endroit une force d'évocation peu commune. Mais il faut être sensible à ce charme-là. A la fin du règne Chaban, certains vieux élus bordelais n'avaient jamais mis les pieds aux Bassins à flot, adossés au quartier ouvrier de Bacala