Il y a un million d'habitants dans et autour de Bruxelles. C'est une ville très compacte, y compris vis-à-vis des cultures et des races. Dans mon quartier, il y a des Indiens, des Pakistanais, des Marocains, des Tunisiens. On y parle anglais, français, flamand. Quand il n'y a que des Belges, Bruxelles s'effrite. On entend toutes les langues dans les restaurants, le Marché commun est ici, l'Otan, les Américains. Dans mon building, il y a une Anglaise, un Ecossais, un Hollandais, un Flamand, un Wallon. Tout est mélangé, c'est naturel pour nous, à l'image du dialecte bruxellois, que parlent encore certains vieux. Bruxelles est une ville pour nous tous, aussi ouverte qu'une vieille pute. Le Front national ne marche pas ici, on a besoin de gens qu'on vit avec. C'est une ville qui m'inspire. Dans ma tête, c'est le bordel, donc je ne fonctionne que dans le bordel. Ma vue de la cuisine : des églises, des grues, les toits en ardoise, un garage style Bronx, des bâtiments des années 70, un béguinage qui a brûlé... Ça change chaque année, c'est un Lego. Seul peut-être Budapest s'apparente un peu à ça, mais en moins contrasté.
On peut manger ici vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il y a des bistrots qui n'ont pas d'heure de fermeture. J'en connais même qui n'ont pas de clé pour fermer la porte. La vie nocturne belge est différente des autres. On prend rendez-vous dans les bistrots, on va manger, après on rentre au bistrot et on fait le club, où il n'y a pas un chat avant 2 heures du ma