Menu
Libération

Là où les jeunes s'échouent

Article réservé aux abonnés
Attirés par le Sud, ils passent à «Perp», en partent et y reviennent.
publié le 29 novembre 2003 à 2h07

Perpignan envoyé spécial

Pour rappeler où ils sont, ils disent souvent «le Sud». «Le Sud», pour Perpignan. Fabien et Kevin le coupent en «Perp». Ils cherchent un chien. Dix-sept ans tous les deux. Fabien passe pour un adulte, plus sûr de lui. Son pote fait 14 ans. Ils appellent pour une annonce parue dans Contact Roussillon. Au téléphone, Fabien dit qu'il aime les animaux «affectueux». Surtout pour sa «petite fille». Oui, il a un grand jardin pour le faire courir. Il raccroche en éclatant de rire. «Elle m'a proposé un Télé Z. Tu me vois faire de la sécurité avec un Télé Z ?» Le «Télé Z», c'est le chien en couverture du magazine du même nom, avec des oreilles qui traînent par terre.

En fait, Fabien n'a ni maison avec jardin ni petite fille. Il est à la rue. A Perpignan, dans un squat avec des trous dans le plafond, proche de la gare. Ces deux-là se lavent comme ils peuvent, «tournent» au kebab, 3,80 euros. Ce sont deux ados «en rupture». L'un dit que ses parents ont disparu (il est arrivé à Perpignan il y a sept ans), l'autre qu'il ne veut plus les voir (ils sont dans l'Aude). Eux, leur quotidien, c'était longtemps famille d'accueil et foyers.

Fabien est en stage de formation. Pour leur futur chien, ils ont acheté des laisses neuves et trouvé des croquettes que leur a données un véto. Ils ont arrêté de réclamer au boucher depuis qu'il met «la javel» sur les os. Quand une sirène de police hurle, ils se retournent, inquiets. A Perpignan, qu'ils connaissent comme leur poche, les de