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SANTÉ. Une initiative inspirée par les réseaux d'entraide des femmes africaines. Des tontines pour affronter le sida. Objectif: assurer un minimum vital à ceux que la maladie a exclus.

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publié le 13 juin 1995 à 5h26

Quand la première tontine s'est formée pour aider Emmanuel, il n'était même pas sûr de manger tous les soirs à sa faim. A 28 ans, malade du sida, brouillé avec sa famille, il vivait dans une solitude noire qu'il se plaisait parfois à entretenir. Un an plus tard, Emmanuel va bien, il a retrouvé le goût d'écrire et même, à petites doses, celui de voir des amis.

Tarek vivait lui aussi sans ressource avant de connaître la tontine, ce réseau calqué sur les systèmes de solidarité des femmes africaines. Sans sécurité sociale ni permis de séjour, il s'enfonçait dans la maladie. Aujourd'hui, il a trouvé des amis, un petit job et de nouvelles raisons de se battre. Ces deux histoires n'ont rien de miraculeux. Les quelques malades du sida qui bénéficient aujourd'hui de l'aide d'une tontine connaissent désormais cette sécurité née de l'assurance que, chaque mois, de parfaits inconnus vont leur donner, sans aucune contrepartie, 2.500 francs pour les aider à payer leur loyer, d'autres frais, ou tout simplement à mieux vivre. En un an, dix tontines sont nées en France et huit autres à l'étranger, aux Philippines, aux Etats-Unis et au Cambodge. Quatre nouvelles tontines sont en instance de formation. Comme toutes les bonnes idées, la tontine est une idée simple. En Afrique, les femmes d'un village ont l'habitude de mettre leur argent en commun pour aider l'une d'entre elles, même si elles ne la connaissent pas directement, à financer un projet. C'est ce modèle qu'utilisent aussi les Chinois