Enserrée par des gorges coiffées d'ajoncs, de pierre noire
feuilletée et de vent en biais, la rivière Daoulas roule sur l'or. Jacques Le Quéré, unique chercheur d'or à l'ouest de la France, le sait: l'eau coule douce sur un lit de gravelle, de cailloux et de grisaille de sable où dorment quelques paillettes du métal jaune. Chaussé de cuissardes, il plonge sa barre à mine pour écarter le plus gros de la caillasse et atteindre les couches où dorment les têtes d'épingle d'or, mais aussi, à l'occasion, des pépites plus conséquentes, titrant toutes 22 carats. La plus grosse qu'il ait trouvée - dans une autre rivière pas loin d'ici - pèse ses six bons grammes et pend à une chaîne, au cou de l'orpailleur. Des amateurs d'or sous sa forme minérale lui en ont déjà offert 15.000 F.
La pelle fouaille, retire sa charge de sable, mêlée de glaise et de graviers. Les avals des rochers, les dévers de courbes de la rivière sont les plus féconds. Dans la batée, cette cuvette dérivée de la poêle des gold-diggers californiens, les cailloux sont lavés de leur gangue d'argile grasse. En une minute, les impulsions circulaires de la gamelle à fleur d'eau ont rejeté roches et galets et conservé une poignée de sable fin où l'or, plus lourd, a fini par plonger. Un subtil mouvement lave le reliquat, déposant une poussière de points d'or: six, huit, quinze étoiles infimes, brillantes, constellent le fond noir de la batée. D'un doigt qu'il vient de sécher sur sa cuisse, il picore les grains d'or et les en