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Libération

Collections prêt-à-porter printemps-été 1996. Les lacérations de Yohji Yamamato

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publié le 18 octobre 1995 à 9h11

Yohji Yamamoto a bouleversé l'univers de la mode dans les années 80

en présentant des vêtements injustement qualifiés de «lambeaux». La sérénité de la cinquantaine atteinte, il vient de présenter une collection qui n'a rien à voir avec la fascination du résidu. La sensualité chez Yamamoto naît de la finesse des fentes et autres découpes, sortes de lacérations brisant l'austérité de la monochromie. On retrouve ces fentes usuellement destinées à la jupe ou la robe jusqu'au milieu des bras, qui se révèlent au gré d'un geste dans toute leur candeur, leur éclat marmoréen. C'est qu'il y a aussi du sculpteur chez ce Japonais, qui avoue avoir recours à la fente pour rappeler «la courbure du dos de la femme», une respiration au milieu d'un univers rendu encore plus oppressant par une bande-son (faite maison) aux saturations électriques taillées à la tronçonneuse. Lorsque la fente s'étend sur toute la longueur du vêtement, sur le devant, elle dévoile un fragment de buste émacié. Plaisir de jouer avec deux immenses pans de tissu mis en tension, comme amenés dans une rencontre impossible jusqu'à un point d'équilibre extrême. Rien de nostalgique chez ce passionné de Wenders et de Jarmush, convaincu que «l'être humain ne peut pas revenir en arrière». Aux antipodes de John Galliano, Anglais fraîchement nommé directeur de la ligne couture chez Givenchy. Suiviste plus que successeur, Galliano, phénomène mondain du moment, a ébloui un certain parterre d'amnésiques par des modèles canulars et