Depuis 1986, les anti-IVG sont passés cent vingt fois à l'attaque d'établissements hospitaliers. C'est la partie la plus spectaculaire d'un mouvement qui se dit «provie». Sous ce thème fédérateur et fourre-tout, les opposants à l'IVG tentent depuis plus de vingt ans d'imposer un ordre moral, une mise au pas des femmes avec toute une reconstruction du discours: les termes foetus ou embryon sont remplacés par «enfant» ou «tout-petit», la contraception devient un «gazage», le RU 486 égale le «zyklon B», l'IVG est un «holocauste». Fiammetta Venner, jeune chercheuse en sociologie, en a dressé le panorama complet. Son livre, l'Opposition à l'avortement (1), met à jour l'idéologie véhiculée; l'évolution des stratégies; le lobbying politique, auprès des parlementaires, ou économique, contre les laboratoires pharmaceutiques; les modes de financement et les diverses influences qui ont revitalisé les anti-IVG: «pro-life» américains, catholiques traditionalistes avec la machine de guerre qu'est l'Opus Dei et l'appui d'une partie du clergé, soutien inconditionnel de l'extrême droite. Très documenté, l'ouvrage répertorie toutes les associations dont certaines avancent masquées , donne un index des noms cités permettant de repérer la nature du réseau. Et il jette une lumière inquiétante sur l'indulgence, voire le concours, dont les anti-IVG disposent dans le monde politique et les professions de santé.
(1) L'Opposition à l'avortement, du lobby au commando, par Fiammetta Venner. Edition