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Libération
Reportage

Barkerville, cité fantôme de la ruée vers l'or.

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publié le 14 septembre 1996 à 11h06

Derrière Vancouver,

à pied ou à cheval, les revenants continuent de se glisser sur la route qui mène de Quesnel à Barkerville.

Plus grande ville au nord de San Francisco, au temps où les orpailleurs de Californie traçaient vers les Rocheuses, Barkerville recèle encore quelques pépites.

Cariboo road envoyé spécial La porte du camping-car bat comme un portillon de saloon. «Les pâtes sont prêtes», lance Mme Devroede, qui vient de marier sa fille à un informaticien de Vancouver. «Il y a un type qui est mort dans le bois», lui répond Jeannot, l'un des fils, en faisant irruption dans la halte routière de Van Winkle. Le camping-car se vide. Dans la famille belge, tous se précipitent: la mère, les jumeaux de seize ans, la fille, le gendre, Jeannot. Le père ­ mauvaise pioche ­ reste à surveiller les nouilles.

Sous les arbres, une clôture de lattes, une planche verticale gravée: c'est la tombe de Charles Morgan Blessing, tué au printemps 1866 d'une balle dans la tête, avant même d'avoir atteint Barkerville. Son agresseur, James Barry, lui a piqué son fermoir en or et 60 dollars. Des lambeaux de nuages s'accrochent aux pins noirs et aux cèdres qui drapent les versants: «Le coyote fait sa soupe», dit-on ici. Mme Devroede, soulagée, mais vite oppressée par l'isolement, sermonne: «Ne vas pas dans le bois, il y a des prospecteurs qui s'y sont perdus. Il y en a dont on a retrouvé le corps au pied d'un arbre sur lequel ils ont juste eu la force de graver leur nom avec le manche de leur cuillère