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Libération

Cheval de trait, le bonheur est dans le pré. Hommage au plus travailleur et au plus affectueux des équidés, vedette de la 8e fête nationale du cheval.

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publié le 27 septembre 1997 à 8h59

Le cheval de trait est un spectacle à lui seul. Croupe à la Botero,

entrejambes conséquents, jarrets noueux et puissants, cuisse solide, reins à la forgeron, épaules maousses, poitrine ouverte à tous les vents et des sabots qui ne rentreraient pas dans une Cocotte-Minute familiale. Mais c'est la tête de l'équidé qui émeut le plus. De grands yeux calmes, sages, ombragés par l'éventail des cils, des ganaches mafflues, douillettes comme un giron maternel, un front large, donc intelligent, frangé d'un toupet aux reflets d'argent, un chanfrein qui ne refuse jamais les caresses et une bouche de velours aux lèvres ridées. Une tête qui respire la bonté.

Ils pèsent souvent leur tonne et ne font aucun bruit, jardinent leur carré d'herbe sans faire d'histoires. Infatigables collaborateurs de l'évolution humaine, ils étaient les stars du turbin au XIXe siècle. Moteurs nourriciers et utiles, ils sillonnaient les champs, les routes et les rues, et le pavé de Paris fleurait bon le crottin. Postier, mareyeur, mineur, transporteur, manutentionnaire à la compagnie des chemins de fer, haleur, ils ont fait tous les métiers, et les plus insensés. Ces multiples labeurs, ces guerres aussi bravement menées, auraient-ils façonné leur paisible caractère au point de les rendre si humbles qu'ils paraissent plus discrets qu'une plume emportée par le vent?

Au temps jadis. Nos grands-parents se souviennent du temps où le réseau routier, quand ils roulaient en Frégate ou en traction avant, offrait à leur vu