L'époque n'est plus aux fumeries de catacombes. Pis: une certaine
ostentation, la mode (plus une top-model sans son gros calibre) et même la goujaterie des fumeurs de la onzième heure risquent de corrompre ce qui ne peut s'épanouir qu'en plaisir rare, distillé, voire pudique. L'insolence devant demeurer, en l'occurrence, tout intérieure. Car la dégustation d'un habano n'est jamais qu'une sorte d'ascèse, dès lors qu'on sait distinguer l'essentiel du contingent, ainsi que tranche Stendhal: «Fabrice fit la revue de ses poches, déchira tous ses papiers et ne garda exactement que son mouchoir et sa boîte à cigares» (la Chartreuse de Parme).
Ce soir, au pavillon Ledoyen à Paris, il y aura cet air-là de confrérie bienveillante à la Troisième Nuit de l'Amateur de cigare, que convoque Jean-Paul Kauffmann, grand prêtre ironique et disert de ce qui n'est pas secte mais religion qui ne demande qu'à ouvrir ses fumoirs. Malheureusement, plus une place depuis longtemps pour cette nuit, où l'on croise d'ordinaire Wolinski ou André Santini, vice-président UDF de l'Assemblée, côte à côte avec l'étudiant qui a épargné, franc à franc, pour s'offrir la soirée. Les femmes n'y sont pas rares, non plus. D'autre part, les clubs, y compris féminins, et restaurants à caves honnêtes se multiplient, qui témoignent d'une vogue rien moins qu'anecdotique.
Nouveaux cigares. Comble de bonheur: la production cubaine, après des années de pénurie, surtout en grands modules, et de qualité hasardeuse, est repartie