Prague, envoyé spécial.
Rose et lisérée de blanc, la façade retapée de frais ne paraît guère différente de celles des grands immeubles néo-Renaissance ou néo-gothique de la toute proche Parizka, l'avenue de Paris, artère chic de la Prague début du siècle, où, depuis la chute du Mur, fleurissent à nouveau les boutiques élégantes. Sous le clocheton, deux cadrans sont superposés. L'un orné de chiffres romains, l'autre de lettres hébraïques. Les aiguilles du premier tournent normalement de gauche à droite. Celles du second vont de droite à gauche, comme on lit l'hébreu. De telles horloges sont très rares. Celle de l'hôtel de ville juif est probablement la seule qui orne la façade d'un bâtiment public comme pour signifier un temps tournant éperdument à rebours. Celui de la mémoire car il n'y a plus guère de juifs à Prague. «A peine 1200 alors qu'ils étaient 32 000 avant guerre et plus de 700 communautés juives vivaient en Bohême», raconte Jiri Fiedler, historien du patrimoine, qui traque et répertorie inlassablement depuis un quart de siècle les vestiges d'un monde balayé par la Shoah.
Gothique et baroque. Depuis la fin du communisme, le tourisme de masse a déferlé sur la capitale tchèque. Les boutiques de souvenirs se multiplient aussi dans le zidovske mesto, l'ancien quartier juif mais il suffit d'éviter les saisons les plus courues, pour retrouver l'envoûtement d'un lieu qui fut le coeur de la Prague magique (1) racontée dans un livre homonyme par le grand slaviste italien Ang