Il fait bon arriver à Odessa dans «la senteur épicée des acacias» d'un soir de printemps «doux et alanguissant» dont parle Issaak Babel. Ou bien retrouver cette ville improbable la nuit venue, au retour d'une journée passée allongé sur l'une de ses plages, celle, discrète et un brin désuète, de la «neuvième station de la fontaine» ou bien celle de la «treizième station», élue cette année par la dizaine d'hurluberlus qui font la mode odessite, tel Nold, directeur artistique des Maski, cette bande de gais lurons qui sont à Odessa et, à toute l'Ukraine et la Russie ce que les Monty Python sont à l'Angleterre. C'est l'heure sans heure où, à l'orée du port, les escaliers du Cuirassé Potemkine d'Eisenstein, en mal de landau, voient débouler des marins malais en goguette qui n'ont pas un regard pour les vendeurs de babioles militaires héritées des années soviétiques. L'heure où les prostituées se promènent deux par deux le long de Deribasovskaya, rue piétonne où, aux premiers beaux jours, les terrasses des cafés prennent possession des larges trottoirs. L'heure où les méandres du vin ukrainien vous rendent triste et gai à la fois, où un singe en tutu rose vous propose une photo souvenir, où, fourbu, vous vous dites que Babel, a raison: cette «ville, quand même et malgré tout, est extraordinaire».
Mosaïque. Voulue à la fin du XVIIIe siècle par une impératrice russe (Catherine II), fondée par un amiral né à Naples, construite à angles souvent droits par un archite