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Libération

L'Argentina, pour oublier Nice. Entre Piémont et Riviera, des villages italiens hors du temps se nichent dans une vallée secrète.

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publié le 24 octobre 1998 à 12h30

Triora, envoyé spécial.

La mer n'est pas loin, la haute montagne toute proche. Les voisins français sont vraiment des «cousins» et les compatriotes italiens, visiteurs d'un été ou d'un week-end, presque des étrangers. La vallée de l'Argentina est coincée entre le Piémont et la Riviera qui va de Vintimille à Gênes, mais ses habitants se disent aussi volontiers citoyens de la tera brigasca. Les dictionnaires et les administrations taisent cette vieille nation sans Etat, à cheval sur les deux pays, ignorant superbement la frontière officielle séparant les Alpes-Maritimes des "Alpe marritime". Au fond de la vallée, au village de Verdeggia, le seul panneau d'informations vous indique ainsi que vous êtes «ben arivaï en tera brigasca». Prétendrait-il que vous êtes rendus au paradis que bien peu songeraient à le contester. La route ne va pas plus loin. Elle est partie cinquante kilomètres plus bas des plages d'Arma di Taggia, ville balnéaire sans charme à mi-chemin de San Remo l'assoupi et d'Imperia l'industrielle, mais au fil des virages incessants on a vite oublié cette vilaine portion du littoral au lustre fané. Comme tous les villages de la région, Verdeggia est un bouquet minéral perdu dans un océan de verdure. De décembre à mars il pleut beaucoup, neige un peu, et l'été le cagnard tape, alors ça pousse. La vallée est à la croisée des brises de sirocco et des bourrasques alpines. Au pied du village, sous les rayons du soleil, on cultive en terrasses le légume méditerranéen. Pl